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Une enfance solitaire
Né en 1979, dans le quartier Hochelaga-Maisonneuve, Jean-Simon a souffert de la violence mutuelle de ses parents au cours de son enfance. Bien qu’il n’ait pas été directement touché, il a assisté seul au spectacle de ses parents qui se battaient. Arraché à son domicile alors qu’il est âgé de cinq ans, il est conduit en centre d’accueil, où il résidera neuf ans. Pendant ses années au centre, il souffre d’exclusion et du jugement des autres. Il passe ses soirées isolé dans sa chambre, à regarder par la fenêtre en espérant apercevoir sa mère.
À l’âge de quatorze ans, il peut enfin en sortir et retourne vivre chez sa mère, avant de passer un bref intervalle chez son père. Aucune de ces expériences ne le satisfait. Il comprend qu’il a besoin de vivre des choses de son côté. Il les découvre avec la drogue. Même si l’expérience dure moins d’un an, elle n’en demeure pas moins intense. Son mode de vie le rend violent et il continue de consommer des substances qu’il considère comme une échappatoire.
L’année 1996 marque un tournant dans la vie de Jean-Simon. Le décès de sa grand-mère va déclencher chez le jeune homme, alors âgé de dix-sept ans, une profonde dépression qui le conduira à l’hôpital. Le médecin lui diagnostique une psychose, mais Jean-Simon se rend vite compte qu’il souffre surtout de dépendance affective.
En effet, tout au long de son enfance, il a manqué de reconnaissance et d’attention, ce qui a développé chez lui un besoin de plaire à tout prix, d’être aimé et accepté. Prenant conscience de cette carence, il entame alors un processus de guérison par la poésie et l’écriture. Pour la première fois, il arrivera à nommer les démons qui le tourmentent.
Passion poétique
Jean-Simon a eu beaucoup de mal à se trouver une identité. Peu scolarisé, n’ayant complété que la première année du secondaire, il apprend de ce qu’il voit et a tendance à imiter des comportements qui lui sont familiers. Ainsi, il se retrouve perdu entre l’image de son père et la trop grande sensibilité de sa mère. L’écriture l’aidera à s’affranchir de ses parents et à trouver sa propre voie.
« Ça m’a donné un statut, à la base », déclare-t-il. Elle lui permet de s’affirmer. Ses vers mettent en avant la force des mots, reflet du caractère de son père, et la sensibilité de la parole, qui est une projection de la personnalité de sa mère.
Chacun des textes du poète signale l’importance qu’ont eue les femmes dans sa vie, à commencer par sa mère, première d’entre elles à le blesser, bien malgré elle. Il transpose son image chez les femmes qu’il recherche, puisqu’il ne sait pas qui il est, ni ce qu’il aime. Il a besoin d’attention et de reconnaissance, peu importe qui lui en donne. « J’étais en amour avec l’amour », explique-t-il.
Aujourd’hui, il s’est trouvé et il continue d’écrire sur les femmes, ses muses. Chacune d’elles est une source d’inspiration. Il croit en l’importance d’entretenir de bonnes relations et chaque personne dont il fait la connaissance lui apporte quelque chose.
Renaissance, son premier recueil est publié en 2006, neuf ans après qu’il ait commencé à écrire. Il comprend ses poèmes de 1997 à 2005, résultats d’expériences et d’observations sociales. onze autres recueils suivront. Chacun d’eux aborde des sujets sociaux. Le poète cherche à mêler son vécu à celui de personnes souvent marginalisées afin de mettre au jour leur quotidien et leurs expériences de la vie.
Jean-Simon se promène à travers Montréal et va de bar en bar pour trouver son inspiration et mettre des mots sur le vécu des autres.
Un éventail de projets
Au cours de sa vie, le poète a poursuivi de nombreuses autres activités. Alors qu’il résidait en centre d’hébergement pour adulte, lui et quelques autres jeunes avaient été approchés par un organisme pour monter une pièce de théâtre sur le sujet de leur choix.
Ils avaient décidé d’aborder le thème des préjugés et Jean-Simon s’était chargé de l’écriture avec un ami. Cette pièce racontait la journée de Patrick Leblanc, toxicomane le jour et trafiquant de drogue la nuit, un jeune confronté à ses propres préjugés comme à ceux des autres à son égard.
Il a également donné des ateliers de poésie auprès de l’organisme communautaire Spectre de Rue. Il offrait à de jeunes toxicomanes un moyen de s’exprimer lors de leurs moments de répit. Ils s’étaient mutuellement apporté de la lumière puisqu’ils souffraient du même mal de vivre. « L’échappatoire était juste différente, lâche Jean-Simon, la souffrance reste la souffrance. »
C’est en 1997 qu’il découvre le Café Graffiti. L’organisme aide les jeunes marginalisés à se retrouver dans la société. En dépit de tout, il montre des réticences à s’y rendre, ayant un passé violent avec certains des jeunes qui fréquentent l’endroit. Lorsqu’il décide finalement de visiter le Café, son directeur lui propose de demander une subvention qui lui permettrait d’y être embauché! Jean-Simon accepte l’offre et la subvention est accordée peu de temps après. Ce sera l’amorce de la publication ultérieure de ses œuvres.
VIVEMENT POÉSIE
Jean-Simon Brisebois
Jean-Simon Brisebois est un poète urbain. Il observe le vécu des autres et retransmet les émotions de ceux qui ne peuvent pas s’exprimer. Même si la vie lui a réservé beaucoup d’épreuves, la poésie l’a aidé à façonner son identité et il en ressort aujourd’hui beaucoup plus fort.
Jean-Simon Brisebois,
Sous un berceau d’étoiles.
Par Ricardo Langlois
13 livres en près de vingt ans. Le poète écorché, victime d’intimidation, d’agression et de rejet (1), est un guerrier qui a choisi la poésie comme arme massive. « Sous un berceau d’étoiles », commence par une mini biographie de l’auteur. Je l’avoue après avoir lu autant de drames et de souffrances, je me suis mis en boule pour pleurer comme un enfant.
L’éternité, ça commence ici
En rencontrant Jean-Simon, j’ai vu son aura, son âme, la splendeur d’un enfant qui a grandi trop vite. La vie est lumineuse quand on rencontre des gens qui sont charitables juste par leurs présences. Quand on est en présence de l’auteur, qui a assisté à deux de mes lancements, je n’en revenais pas de son humilité. Et pourtant? Il parle de sa mère. La relation toxique (le cœur en otage). Je pense qu’il sait que l’éternité commence ici. Il se prépare déjà avec le pardon.
« Tel funeste vaisseau d’or
Voguant dans les eaux mouvementées
De ma délinquante jeunesse » (p. 24 )
« Demandant à Dieu un peu de temps
Laissant s’échapper un dernier cri
Dans le couloir de la mort » (p. 26 )
« Je suis une parcelle de mon infini
La source d’une divine création
Je suis » (p. 37)
L’expérience temporelle
Admirateur de ma poésie, je fais alliance avec la Lumière. Si mon écriture est initiatique, l’auteur s’y approche dans une expérience temporelle. Dans son espace de solitude, d’enfant sauvage laissé à lui-même. Accueillant, charmant et chaleureux, le poète vit pourtant dans un monde parallèle où la femme a un rôle important.
« Tu es la plus belle de mes histoires
Avec toi c’est vivre un conte de fées (p. 57)
Ou
Toi qui dans un elliptique
Moment de bonheur
M’as donné ton cœur (…)
L’envie de s’aimer
Est plus forte que l’infini » (p. 58 )